La guerre contre Khadafi n'est pas gagnée

C’est officiel : la France s’est engagée dans le conflit libyen depuis deux jours. Tirs de missiles et destruction de quelques véhicules appartenant aux forces pro-kadhafi, cette intervention militaire de la coalition ( USA, France & Grande Bretagne principalement) est lourde de conséquences, tant sur le plan militaire que sur le plan politique. Et l’empressement quasi suspect du gouvernement français à soutenir l’insurrection libyenne la place en ligne de mire des représailles kadhafiennes.

Même si au premier abord, le rapport de force entre les armées fidèles au dictateur et la coalition des principales puissances occidentales apparaît défavorable à Kadhafi, cette intervention militaire est un pari risqué pour la Coalition et le renversement du dictateur est loin d’être gagné.

En effet en premier lieu, à l’instar de l’ex-dictateur Saddam Hussein, Kadhafi peut compter sur le soutien d’une grande partie de la population libyenne. Et celui-ci a de grandes chances d’être catalysé par l’intervention occidentale : au lieu d’y voir une intervention amicale, il y a de grands risques de voir apparaître une méfiance vis à vis des forces étrangères. L’ingérence a ses limites, et il n’y a pas à creuser extrêmement profond pour y découvrir un intérêt pécunier, notamment au niveau du pétrole.

En second lieu, la majeure partie de l’armée libyenne soutient le colonel Kadhafi, contrairement aux cas tunisien et égyptien. C’est d’ailleurs cet appui militaire qui a permis le retour du dictateur, que les médias occidentaux annonçaient pourtant quasiment renversé… Et la folie du dictateur peut trouver un écho dans cette force armée, où la notion d’objection de conscience est bien peu répandue : c’est ainsi que des massacres ont été commis par l’armée libyenne pendant les insurrections du mois de février, sur ordre du dictateur. L’armée libyenne soutient son chef, et elle ira jusqu’au bout.

En troisième lieu, le colonel Kadhafi jouit d’un prestige international sur les pays africains, notamment les membres de la ligue arabe et l’OPEP (dont fait partie la Libye). Au mieux, ces pays dénonceront ces attaques occidentales en restant neutres, et c’est d’ailleurs le scénario qui se profile. Aujourd’hui, la Ligue Arabe a vivement critiqué l’intervention militaire occidentale, principalement d’ailleurs les bombardements massifs britanniques et américains d’hier (plus d’une centaine de missiles tirés). Mais il faut comprendre que le temps joue contre la coalition occidentale : la défiance économique de l’OPEP vis à vis des Etats Unis peut devenir également politique si les militaires commencent à stationner et à occuper la Libye.

Enfin et surtout, le colonel Kadhafi peut compter sur le soutien de la plupart des musulmans radicaux, pour qui il n’a jamais caché sa sympathie et son soutien. Kadhafi fut l’un des premiers dirigeants politiques à s’élever contre la votation suisse sur les minarets, et appela même à l’époque au djihad contre la Suisse! Kadhafi n’a t’il pas appeler l’Europe à se convertir à l’Islam ? L’intervention occidentale en Libye a de grands risques de le faire passer pour un martyr et les répercutions sur les mouvements islamistes européens peuvent être lourdes de conséquences…

En clair, l’issue de cette intervention militaire occidentale est loin d’être évidente. Sarkozy, si empressé de faire oublier son incompétence en Tunisie et en Côte d’Ivoire, et misant sur la faiblesse évidente de l’armée libyenne, s’est volontairement placé au premier rang des « traîtres du parti du diable » pour redorer son blason à l’approche des élections. En oubliant qu’en première ligne de ce conflit, les soldats français risquaient leur vie pour un méprisable intérêt électoral…

Source : royaumedefrance.fr